Raymonde et Andrée, deux jeunes centenaires

Raymonde et Andrée, 100 ans
Raymonde et Andrée

C’est toujours une chance de rencontrer des centenaires. Elles ont traversé l’Histoire, les époques et connu tant d’évolutions et d’innovations.

En 100 ans, le visage de notre pays s’est considérablement modifié, et de notre région encore plus. Les paysages, la vie quotidienne, le monde rural, la maison, le travail, tant de choses qui ont subi de profondes mutations. La machine a remplacé l’homme, on se déplace en voiture, la télévision a remplacé les veillées, les femmes qui travaillent touchent leur salaire sur leur propre compte bancaire.  Témoignages croisés de Raymonde Dubouchet et d’Andrée Boissard qui ont eu toutes les deux 100 ans, les 24 et 26 novembre.

Ça fait quoi d’avoir 100 ans ?  Pour Andrée, c’est une surprise : « Je ne m’attendais pas à ça. C’est passé tellement vite ! ».  Pour Raymonde, c’est presque une tradition familiale, il y a déjà eu des centenaires dans la famille.

Andrée est originaire du Jura, elle a perdu sa maman alors qu’elle a 21 ans et jeune engagée ambulancière dans l’armée de terre en poste en Allemagne. Elle sera alors démobilisée pour prendre en charge la maison et la famille dont le plus jeune a 3 ans.  Quelques années plus tard, elle décide de faire des études d’infirmière. A l’époque, les études étant totalement à la charge des apprenants, elle fera un prêt auprès de sa famille pour la scolarité, ses équipements, et son logement. « Je me suis battue pour cette opportunité. Beaucoup auraient voulu que je reste à la maison. Mais je suis plutôt indépendante ».

Raymonde est originaire de Cruseilles, d’un milieu rural. Elle perd son papa à l’âge de 9 ans, « fait prisonnier et gazé par les allemands », drame dont elle a été témoin. Dès l’âge de 12 ans, elle a dû aller travailler « pour faire bouillir la marmite ». Elle n’aura donc pas la chance de pouvoir faire des études. Raymonde malgré une enfance qui l’a marqué « regrette cette époque et sa jeunesse. On n’a pas eu une enfance gaie, mais on était heureux. On ne vivait pas dans l’abondance, mais il y avait pour notre bonheur, la fraternité, l’entraide, la confiance et le partage. C’est cela qui faisait notre bonheur.  On se contentait de peu. Aujourd’hui les temps ont changé ».

Andrée, une fois ses études terminées, veut devenir infirmière libérale. Elle rencontre son futur époux, aura trois enfants et « je dois m’arrêter de travailler pour élever mes enfants. C’était comme cela dans la famille. La femme est au foyer. Mes enfants plus grands, lorsqu’ils sont au collège, je retourne au travail. J’aimais aller travailler. Je me suis toujours débrouillée. J’ai toujours dû défendre ma place, à la maison et en société. J’ai fait mon maximum pour être indépendante tout en faisant ce que je devais faire ».

Raymonde rencontre très jeune son futur mari qui est d’Arbusigny. « Jeune ménage » ils entrent tous les deux à l’hospice de Reignier, lui comme cuisinier, elle comme lingère, ils auront trois enfants.  « À l’époque les familles qui travaillaient à l’hospice étaient logées sur place. C’était une ville dans la ville. Les enfants lorsqu’ils n’étaient pas à l’école, étaient tous dans le parc, qui était clos. Il y avait une garderie interne, un service d’étude et d’aide aux devoirs. Le logement était gratuit. On était dans un monde à part. Ensuite, ils ont construit une résidence collective pour loger les salariés en dehors de l’hospice ».  Raymonde est restée à son poste jusqu’à ses 60 ans.

Elles retiennent beaucoup de belles choses de leur vie, mais des choses beaucoup moins belles de l’évolution de l’Histoire et du monde.  Si elles reconnaissent le positif de la science, des innovations, de la santé, elles retiennent que « l’Homme a la capacité maladive de détruire ce qui était bien, ce qui a été fait de bien. Ils inventent des tas de choses pour faire le bien, mais souvent cela fini par être pire qu’avant. La modernité nous conduit là où il ne faut pas ». « Le Monde ne va pas bien du tout ! Ce qui arrive, c’est déjà produit. On ne retient pas les leçons de l’histoire ! ».

Toutes les deux ont de belles surprises qui se préparent pour leur anniversaire.

Ce sera en famille. Et les familles sont grandes ! Raymonde a quatre petits-enfants, 9 arrière-petits-enfants et quatre arrière-arrière-petits-enfants. Andrée a huit petits-enfants et 12 arrière-petits-enfants.

Joyeux anniversaire et tous nos vœux.

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